Album « The Year Of How To Book » sortie le 29 Mars
Single  “Twenty Thousand Light Years” sortie digitale le 8 février.

"A perfectly executed debut album by the new US-Underground sensation.” - ROLLING STONE  

“Art-pop sensibilities of contemporaries like Wolf Parade and the
Arcade Fire - an engaging, emotionally-wracked self-titled album.” -
SPIN MAGAZINE

“Claustrophobic and celebratory. Majestic and intimate. And (almost) no comparisons.” - MUSIK EXPRESS   

"Fresh songs that combine a well-orchestrated kitchen-sink aesthetic
with the jubilant moroseness of the past generation of Smiths - both
the Morrissey-led band and The Cure's gloomy Robert." - PASTE MAGAZINE

“Among the most gifted of the current crop of American bands. Capable of anything.” - DIE WELT 

Sans vouloir forcer le destin, Eagle Seagull s’est glissé avec grâce dans la catégorie des groupes dont on parle, de ceux qu’il faut surveiller, des nouveaux talents émergents, appelez ça comme vous voudrez. Heureusement, il y a derrière le battage médiatique un premier album éponyme plus que prometteur (publié en 2006) et une suite délirante, dont la sortie est imminente, ainsi que plusieurs années de tournées intensives, ce qui n’est jamais une mauvaise chose pour aider à définir l’ADN d’un groupe. Tout particulièrement quand on trouve parmi ses adversaires sur le circuit des formations aussi différentes que The B-52s, Gnarls Barkley et Tokyo Police Club. Une courbe d’apprentissage aussi grisante qu’une piste de ski.
2010 voit la sortie de ce qui est traditionnellement considéré comme le difficile deuxième album, mais, voilà, “The Year of the How-To Book” est inondé de mélodies retentissantes et de cordes sereines, sans jamais rien sacrifier de l’énergie de son prédécesseur.
Dans un monde devenu tellement référentiel (ça sonne comme A plus B dans un mixeur avec une pincée d’acide) qui nous entraîne toujours plus bas sur une pente glissante vers des diagrammes de Venn de ceux qui ont les mêmes goûts que nous (si vous avez acheté ceci, vous casquerez probablement pour cela), il devient plus difficile que jamais de tomber sur un son qui sorte de nulle part. Alors, d’où viennent Eagle Seagull ?   

Les Amazoniens prétendent que si vous aimez Spoon (jamais écouté) ou Bowie (tout écouté jusqu’à Tin Machine) vous aimerez ceci. Des noms comme The Cure et Pulp surgissent sans cesse, non sans raison, indiquant des tendances anglophiles au sein du groupe. “I’m Sorry But I’m Beginning To Hate Your Face” rappelle effectivement le Robert Smith guilleret qu’on découvrait quand il était dans un bon jour, et “The Boy With A Serpent In His Heart” évoque les débuts gris plombés de Pulp à Sheffield quand Jarvis sonnait comme un gars paniqué plutôt que comme un parodiste pop.     

Eagle Seagull est signé sur le label consacré [PIAS] Recordings, fondé à Bruxelles, et semble effectivement se sentir plus proche des ‘common people’ d’Europe que de ses cousins musicaux de son pays d’origine, où la majesté angoissée d’Arcade Fire pourrait être considérée comme faisant partie de la famille. En remontant légèrement plus loin, on pourrait aussi évoquer Grandaddy, quand ils réussissaient à se faire passer pour les solitaires indés par excellence tout en déversant des splendeurs symphoniques (Summer’s Here Kids) sur la tête d’un public initialement non averti. Grandaddy venait des terres agricoles situées autour de Modesto, en Californie, alors que les membres d’Eagle Seagull (Mouette Aigle) sont des enfants des plaines agraires du Nebraska, un État sans débouché sur la mer, à peu près aussi éloignés des mouettes qu’on peut l’être.
Est-ce une indication géographique du désir d’Eagle Seagull de s’élever au-dessus de leur territoire, là où les frontières deviennent indistinctes ? Le Nebraska, lieu de naissance du Kool-Aid (célèbre boisson en poudre américaine, NdT), une anomalie en Technicolor dans un paysage par ailleurs totalement monochrome, est une région de communautés rurales sur le déclin, située au centre du Frontier Strip (qui marquait la limite ouest des États-Unis au 19ème siècle). Bright Eyes et Saddle Creek, rendons-leur justice, ont épinglé un petit drapeau sur la carte du Nebraska, mais malgré cela Eagle Seagull, mesdames et messieurs, flottent dans l’espace, un vide (comme le devient un visage dans une chanson) dans lequel leurs fans peuvent déverser leur adulation. Ils sont déjà à une hauteur qui semble inspirer à leurs admirateurs de poétiques déclarations d’amour. Ils n’ont donc pas besoin de s’inquiéter du fait que la profusion de louanges critiques récoltés jusqu’à aujourd’hui pourrait s’avérer être le proverbial baiser de la mort.
La mort, comme nous le savons, n’est pas la fin (Death Is Not The End est une fameuse chanson de Bob Dylan, NdT), mais elle n’est jamais très loin. Les blogeurs décrivent la musique d’Eagle Seagull comme une joie morose ou du Ritalin mélodieux, un état modifié de sensibilités quasi-Gothiques. Il y a quelque chose de la phrase de Beckett, “death has not required us to keep a day free” (la mort ne nous a pas demandé de garder un jour de libre) dans l’implacable réalité de la mortalité de “You’re the reason why” ou dans la poussière retournant à la poussière à l’infini de “all we've known, and all of the rest... must someday creep silently to death... and never say goodbye” (tout ce que nous avons su, et tout le reste… doit un jour ramper silencieusement vers la mort… sans jamais dire au revoir). L’amour a un prix, qui consiste à tendre un miroir à la certitude de ne jamais pouvoir dire ce que vous voudriez dire à la personne dont vous aimeriez le plus qu’elle l’entende.    

Peut-être la réponse se trouve-telle dans un How-to Book (livres typiquement anglo-saxons du genre « comment devenir un bon cuisinier/ trouver le bonheur, etc. »), si on sait où chercher, mais peut-être n’y a-t-il rien au-delà du “hollow space into which my words disappear without trace” (l’espace creux dans lequel mes mots disparaissent sans laisser de trace). Qui n’a pas fait l’expérience de la défaite écrasante que constitue, pour une raison ou une autre, une conversation à sens unique, un message non transmis, un sentiment non réciproque ? D’où l’urgence qui traverse l’opus d’Eagle Seagull. Toutefois, et c’est la partie joyeuse, beaucoup de leurs chansons sont résolument optimistes, saupoudrées de paillettes pop magiques. Et même s’ils sonnent tout à fait comme un groupe destiné aux rivages lointains, il y a un élément local dans le mélange, avec A.J. Mogis, le frère du producteur de Bright Eyes, Mike Mogis, présent comme ingénieur du son. Ryan Hadlock (The Gossip, Blonde Redhead, Stephen Malkmus) s’est lui chargé de la production à Bear Creek, près de Seattle.