« If you feel a breeze it might be me/I might pass this way to set you free [...] You'll feel a breeze I might be gone » répète Melanie De Biasio dans le morceau « Gold Junkies ». Elle s'en vient et s'en va, telle un courant d'air, la petite voix intérieure qui nous invite à ne pas laisser filer nos rêves, à ne pas perdre de vue l'essentiel. Paru en juin 2017, ce titre constituait un premier avant-goût de « Lilies », le nouvel album de la chanteuse et flûtiste belge qui paraîtra ce 6 octobre. Il le relie aussi intimement à « Blackened Cities » , l'imprévue et mémorable pièce de 24 minutes parue en 2016.

Difficile de ne pas ressentir le souffle vital, les respirations profondes et les échos peuplant les chansons de Melanie De Biasio (« Donner de la consistance à l'air » était un leitmotiv de « Lilies »). Ses morceaux procurent bien plus que la caresse d'une douce brise. Ancrés dans l'émotion de l'instant, portés par le chant habité, la voix souple et magnétique de son auteur-compositrice-interprète de 39 ans, ils touchent l'auditeur au plus intime.
Cet univers défiant les lois de la pesanteur et des genres (entre whisper jazz-blues, trip-hop céleste et pop atmosphérique) avait déjà fait grand bruit en 2013. De Bruxelles, Paris et Londres jusqu'aux Etats-Unis et à l'Australie. « No Deal », le second album de l'artiste belge, avait suscité une pluie d'éloges, de récompenses et de précieuses rencontres. Des portes se sont ouvertes. La dimension cinématographique de sa musique s'est pleinement révélée, récemment, dans une des bandes-annonces du blockbuster « Alien : Covenant », magnifiquement rythmée par sa chanson « I Feel You » (version remixée par Eels). Par ailleurs, la Belge a noué des liens avec des artistes d’horizons divers, parmi lesquels le groupe britannique The Cinematic Orchestra.

Melanie De Biasio, cela étant, garde la tête sur les épaules, et sa ligne propre. Ni grosse production, ni même producteur renommé sur « Lilies » : elle a préféré, une fois encore, garder les rênes de la réalisation. Le processus de création, elle l'a voulu « hyper intime ». L'album est enregistré « à la maison », dans le home studio de Pascal Paulus, un de ses fidèles compagnons musicaux, qui co-réalise ce quatrième opus. Avec peu de matériel, des micros bon marché. « J'avais envie de me mettre sur un fil. Comment est-ce que je sonne dans ces conditions ? Suis-je toujours aussi créative sans technologie ? » « Ma quête tient en une question : comment cultiver l'art du vivant ? » prolonge la chanteuse - au diapason de ses prestations scéniques, très intuitives, organiques. Résultat : beaucoup de premières prises et peu de coupes (« On prend tout ou rien, pas de chipotage »). Pour le mixage, elle s'adresse à l'Australienne Catherine Marks, sur les conseils convergents d'Arno, de Philip Selway (Radiohead) et du producteur John Parish - trois de ces grands noms touchés par la force de « No Deal » et « Blackened Cities ».

On sait que la chanteuse use volontiers de mots-clés et d'images pour pour esquisser son style musical (« espace », « velours », « silence », « violet », « écho » ...). Avec le nouvel album, d'autres touches s'ajoutent à la palette : « intime », « moite », « chaud » (« j'ai pensé à l'intérieur d'une bouche, à une forêt tropicale » précise-t-elle), « direct », « un maximum d'air » ...
Même - et plus encore - dans ses moments de grand dépouillement et profond ralenti, « Lilies » grouille de vie. Froissements, chuchotements, halètements, pulsations feutrées, instruments libérés. La mélodie de la chanson éponyme, piano-voix fantomatique, s'étire avec une douceur infinie. Celle de l'ensorcelant « Afro Blue » volette gracieusement sur une rythmique hypnotique, effleurant des bruines de piano et de flûte. Dans « And My Heart Goes On », parlando émanant des ténèbres, Melanie explore de nouveaux recoins - graves - de sa voix. L'a cappella « Sitting In the Stairwell » témoigne de son amour du blues ancestral.

Au fil de « Lilies » errent des âmes déboussolées. Pas nécessairement par le désespoir amoureux. « ‘L’ autre’ invoqué dans les chansons peut être un homme, une femme, mais aussi une situation, notre part d’ombre, notre ‘soi’ », éclaire-t-elle. « Il est vain de vouloir changer l'autre ou se changer soi-même. Par contre, l'espoir naît quand on porte son attention sur la relation que l’on a avec l'autre, avec soi, avec un événement. Cette réflexion est au cœur de ce disque. Notamment dans ‘Lilies’, ‘And My Heart Goes On’ et ‘Your Freedom Is the End of Me » - le second extrait, dont le clip a été co-réalisé par Melanie et Yves Kuper*.

En attendant, Melanie De Biasio a renoué avec Charleroi, sa ville natale qu'elle avait quittée à l’âge de 18 ans. En avril, elle a acquis l'ancien consulat d'Italie. Dans cette grande bâtisse chargée d'histoire où elle emménage petit à petit, elle va déployer un « foyer de création », destiné à accueiller des artistes tous azimuts. Une belle manière de participer au déploiement de cette blackened city qu'elle chérit.

18.10 ANGERS - CHABADA
20.10 VALENCE - THEATRE
21.10 LYON - TRANSBORDEUR CLUB
22.10 VENDÔME - ROCKOMOTIVES FESTIVAL
25.10 NANTES - STEREOLUX CLUB
26.10 CLERMONT-FERRAND - COOPERATIVE DE MAI
27.10 BORDEAUX - ROCHER DE PALMER
24.11 MARSEILLE - THEATRE DU MERLAN
25.11 FONTAINEBLEAU - THEATRE DE FONTAINEBLEAU
04.12 PARIS - TRIANON